Village Akourma (Cne Amalou)

Biographies des differentes figures d'Akourma et d'Amalou


Lla Ounissa la voix du canari

 

 


Lla Ounissa la voix de canari

Lla Ounissa alias Kadim Halima  née en 1901 à Akourma ancienne dénomination de la commune Amalou, fille de Laarbi et de Kadim El Djida
Elle a épousé un Kherfellah    en 1919 (à l’âge de 18 ans) une année après soi  1920 le couple s’installa à la casbah d’Alger
Ils ont  eu  deux (02) filles et deux (02)

1924 débuts de sa carrière Artistique
Comment cette femme a t-elle été  approcher par Madame Lafarge ,deux version existent :

La premiere  version :

« Lla Ounissa  travaillait chez Mme Lafarge, cette dernière  adorait l´écouter quand elle berçait ses enfants. A la création de la radio kabyle madame Lafarge proposa à Lla Ounissa d’animer des émissions des achewwiq et d’Urar Lxalat (fêtes des femmes), à cette proposition la jeune femme kabyle se montre réticente. Dans une société à fortes traditions, comme celle de la
Kabylie de l´époque, chanter, relève presque de l´hérésie pour une femme.
Cette réalité ne décourage pas madame Lafarge  elle revient à la charge, finalement, Lalla Ounissa accepte. et fait appel a la niece de son mari (Lla Yamina )
Et c´est le début d´une odyssée qui a traversé les cieux et les lieues

La  deuxième version :
 Mme Lafarge est  fille d’un  général et épouse d’un commissaire divisionnaire. Cette femme née à Akbou, wilaya de Béjaïa, vouait un amour profond à la Kabylie. Elle fréquentait assidûment les cercles féminins des «ourar» à l’occasion des fêtes familiales, Elle se faisait appeler plus tard Tassadit  (prénom kabyle). Un jour, son mari lui fait part de l´intention des autorités françaises de lancer les premiers essais d´émission à partir d’Alger. Seulement, il fallait des voix pour ses essais et c’est comme ça qu’elle a fait appel a Lla Ounissa pour etre la premiere femme kabyle qui ouvre les porte de la radio kabyle :
Voici les témoignages de Lla Yamina Alias Arabe Ferroudja originaire d’Ighil Ali née en 1906 décédée en 2009  orpheline de père et de mère elle a été prise en charge par sa famille maternelle (La famille Kherfellah)
«Quand j’étais à Alger chez mon oncle maternel, je sortais à la recherche d’un travail de femme de ménage. Par hasard, je ne sais comment, il y eut Mme Lafarge chez qui travaillait une certaine Yasmine. Elle a demandé à cette dernière si elle ne connaissait pas des femmes qui pourraient venir donner leur voix. Elle répondit par l’affirmative. Khalti Hlima (Lla Ounissa) est venue chez moi et m’a tenu informée de la demande. Au départ, j’avais peur. Lla Ounassa me rassura en me disant que personne ne saurait ni nous verrait. Nous finîmes par accepter. Nous partîmes à minuit. C’est Lla Ounassa qui donna la première sa voix au micro…»

Vint ensuite Lla Zina (alias Mehdaoui Ouardia de At Wertiran (Beni Ourtilan ) . Ce trio fut baptisé «groupe Lla Ounassa» car c’était la plus âgée. Malgré la crainte, la peur et les aléas de la clandestinité vis-à-vis de leurs familles respectives, les trois femmes utilisaient toutes les astuces possibles et imaginables pour rejoindre la station une fois par semaine,  samedi et dimanche dans la nuit. Et cela dura une dizaine d’années, jusqu’à l’ouverture des ELAK (Emissions de langue arabe et kabyle) dans lesquelles elles furent intégrées dans les règles de la professionnalisation artistique. La station de Mme Lafarge n’avait pas de musicien ni d’orchestre. Elle émettait seulement des voix nues dans le genre «acewwiq», des litanies festives ou religieuses héritées de la tradition musicale villageoise censées toucher la sensibilité des jeunes hommes en partance pour l’exil. Le trio chantait à tour de rôle, debout, face à un micro suspendu Mme Lafarge, ayant vécu à Akbou et s’étant frotté à la langue kabyle des acewwiq  intégra  elle-même le groupe sous le pseudonyme de Lla Tassadith. Les thèmes changent et les voix ne se cachent plus dans les chants anonymes. Elles osent et chantent leurs conditions individuelles
A noter que les émissions de cette radio créée en 1924 et qui portait le nom de sa créatrice « radio madame lafage » ont été émises à la grand poste d’Alger (PTT)
Vint plus tard Djida Tamuqrant alias Henni Merbouha puis Cherifa, puis Khedoudja, Chabha Fettouma…
Ses chansons :
Parmi ses chansons  on trouve le seul achewwiq disponible à la chaine II « Abu trabeq »
Abu trabeq
rebbi irad nekni n sewweq
Vers la fin des années 40’s Lla Ounissa mis terme à sa carrière artistique et tire sa révérence en 1952 à Alger  enterrée à El madania ex Clos-Salembier

Source:-Passerelles. Avril 2008
  et quelques proches et connaissances de la chanteuse.

ZZA

 

 

 

 

 

 

 


23/04/2013
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Abderrahmane Farès

 Né le 30 janvier 1911 à Amalou   dans  wilaya
de Béjaïa , région berbère au centre-nord de l'Algérie. Orphelin très jeune
(son père meurt en 1917 pour la France durant la Première
Guerre mondiale), il est recueilli chez son grand-père et, élève
assidu, est envoyé pour être formé d'abord chez un oncle notaire à Akbou, puis
chez un notaire réputé d'Alger. Après ses études de
droit, il devient tour à tour huissier à Sétif, assistant notaire à Sebdou, et s'installe enfin à
Collo comme notaire en 1936, devenant le premier notaire public musulman en
Algérie. Il entre en politique à partir de 1945, fin de
la Seconde Guerre mondiale, et
devient conseiller municipal, puis siège au Conseil général du département d'Alger[]. Proche
des socialistes de la SFIO, il
devient membre en 1946 de la première Assemblée nationale Constituante (Alger),
Lors de l'insurrection organisée du 1er
novembre 1954, début de la guerre d'Algérie,  marqué par les massacres du Constantinois en 1955, il prend ses distances avec Jacques
Soustelle et sa politique d'assimilation, et se
rapproche du Front de libération nationale (FLN).
Il s'installe en 1956 à Paris en
France, et avec la Fédération de France du FLN il est chargé de collecter des
fonds pour le mouvement indépendantiste et lui apporte notamment des aides
juridiques[]. Le 4 novembre
1961, il est arrêté par les autorités françaises et emprisonné à Fresnes[3].

Libéré à
l'issue des accords d'Évian le 19
mars, il est désigné en avril 1962 président de l'Exécutif provisoire algérien à
sa création, et négocie l'indépendance. Le 3 juillet, la France reconnait
officiellement l'indépendance de l'Algérie et le président français de
Gaulle transfère les pouvoirs à l'Exécutif provisoire[].[]
Durant son mandat, responsable du maintien de l’ordre, il prononce le 30 mars
dans un discours télévisé, devenu célèbre[],
un appel à la paix et au rejet de la violence, notamment destiné aux «
européens » d'Algérie. Des contacts avec l'Organisation armée secrète (OAS)
sont notamment entrepris pour négocier un accord mettant fin à leurs opérations
meurtrières[]. Après la victoire
du bureau politique du FLN et le retrait du GPRA à son profit, la première
Assemblée nationale constituante (ANC) algérienne est formée. Il remet alors,
le 25 septembre 1962, le pouvoir au président de l'ANC, Abbas. En
désaccord avec la politique autoritaire de Ben Bella qu'il dénonce, il est
arrêté en juillet 1964. Il est libéré un an plus tard à l'arrivée de Houari Boumedienne au
pouvoir, et se retire de la vie politique. Il écrit et publie en 1982, ses «
Mémoires politiques (1945-1965) » dans La cruelle vérité, autobiographie
dans laquelle il évoque notamment le période de transition de mars-juillet 1962
et les modalités des négociations de l'indépendance, notamment avec l'OAS.
Abderrahmane Farès est décédé le 13 mai 1991 à Zemmouri ( Boumerdès)

 

 

 

 


27/11/2012
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Zerrouki Allaoua le rossignol et le Tino Rossi Kabyle

ZERROUKI ALLAOUA

 

5 juillet 1915 à
  onze heures du matin : Naissance de Allaoua Zerrouki au village Akourma
  (ancienne dénomination d’Amalou prés d’Akbou) dans la tribu des Aїt Aidel au sud de la ville d’Akbou de Seghir Ben
  Rezki, son père et de Azzoug Ouardia, sa mère.

 

  Vers 1920-1922 : Ecole coranique du village et à la zaouїa de Sidi Hand U Yahia. Il y apprend les rudiments
  de la langue arabe qui l’aideront plus tard à transcrire ses textes.

 

  1927 : Allaoua a 12 ans. Il confectionne lui-même des flûtes avec des tiges
  de roseaux et s’imprègne des mélodies religieuses tout en aidant sa famille
  dans l’exploitation des terres.

 

  1930-1935 : Il quitte le village, rejoint Akbou et gagne la ville de Béjaia
  où il fait le métier de coiffeur tout vouant une passion pour la musique.

  C’est la période faste pour le dandy qui débarque au village affublé d’un
  costume Charleston Prince de Galles.

 

  Rencontre avec le maître de chanson andalouse Sadek Abdjaoui à Béjaia.

  1936 : Début de la Seconde guerre mondiale 

  

  1942 : Décès de son père et de sa mère quelques mois plus tard. Allaoua a 27
  ans.

  

  Eté 1942 : Postulant à l’émigration en France, il est enrôlé dans le travail
  des mines dans le département du Gard. Ne pouvant supporter les dures
  conditions, il s’enfuit à Paris où il fit de menus travaux avant le retour au
  village.

  1945 : Fin de la seconde guerre mondiale.

 

  8 mai 1946 : Il est de nouveau engagé avec ses amis d’enfance du village dans
  une aciérie à Péchiney, une entreprise d’aluminium. Il quitte l’usine au bout
  de trois jours pour Paris où il fait le métier de coiffeur.

 

  12 mai 1947 : Ouverture de la station Radio Soummam dans la ville de Béjaia.

 

  1948 : Il se produit dans des cafés maghrébins et rencontre des artistes
  célèbres comme Lili Labassi, Mohamed El Kamel qui l’encouragent dans la
  chanson.

 

  Eté 1948 : Il enregistre son premier disque chez Pathé Marconi. Une chanson
  en arabe Lahbab Lyoum, kif naâmel aâla lwaqt elli ihhabbel et une
  autre Kabyle inspirée de sa dure expérience dans les mines Tilifun ssunni
  ssunni
.

  Il habite au 10, rue St Sabin, Paris 11ème.

  

  1949 : Il est barman puis coiffeur à la gare de Lyon. Il rencontre une
  poissonnière des Halles qui devient sa concubine.

  Il donne plusieurs spectacles en France, en Belgique et en Allemagne.

  

  1950 : Il rentre au pays et demande la main de Azzoug Nouara, de la famille
  de sa mère, qui avait fait de études et obtenu son certificat d’études
  primaires.

 

  Fin 1953 : Retour en France, à Paris avec son épouse et leur fils, Mohand
  Seghir.

 

  1954 : Déclenchement de la guerre de libération nationale.

  Nouara ayant découvert l’existence d’une française dans la vie de son époux
  rentre à Akbou et demande le divorce qu’elle obtient.

 

  Enregistrement chez Pathé Marconi de plusieurs chansons : llah llah a tin
  hemlagh, a lbabur bu lahwaci, Sidi Aїch, yaâcaq di l-bal.

 

  1955 : Allaoua rejoint Nouara à Akbou et redemande sa main.

 

  26 décembre 1955 : Il reprend la vie conjugale avec Nouara.

 

  1956 : Naissance de leur fille et retour de nouveau en France. Orage dans la
  vie du couple. Nouara rentre définitivement au pays et prend le maquis comme
  infirmière combattante. Elle tombe les armes à la main.

 

  Fin 1956 : A l’antenne Kabyle et Arabe (AKA) ouverte au sein de l’ORTF de
  Paris, dénommé Radio - Paris, il enregistre A rrebbi lfedhl-ik muqqwar et ay
  afrux a mm is n lhar.

 

  1959 : Enregistrement de lewjab n was a, un émouvant hommage rendu à la
  figure historique le colonel Amirouche tombé au champ d’honneur le 19 mars
  1959.

 

  Enregistrement d’autres chansons d’inspiration nationaliste : ya rrebb
  lehnin, ay agelid, a sselah igawawen.

 

  1963 : Chanson de l’indépendance : laâlam ledzayer yetsrefrrif et l’une de
  ses plus belle chansons dédiée à Nouara en particulier et à la femme kabyle
  en général (actuelle Ibn Khaldoun) à Alger. Parmi ses musiciens, Kamel
  Hammadi.

 

  17 novembre 1968 : Allaoua Zerrouki s’éteint des suites de maladie à
  l’hôpital St André des Arts, Paris 1er, à l’âge de 53 ans.

  Il est enterré au cimetière Thiais

 

  Eléments biographiques et discographiques :


 

  Sur la rive sud de l’oued Soummam, dans la vallée historique du congrès du 20
  août 1956, à une dizaine de kilomètres de la ville d’Akbou où plusieurs
  producteurs de cassettes rééditent son œuvre, la région natale de Allaoua
  Zerrouki, la commune d’Amalou, disperse ses quatorze villages vers Sidi Aїch à l’est et Tazmalt vers l’ouest.

  Au sud, la montagne aux riches gisements ferreux, gueldamane, confère au
  paysage une touche surréaliste.

 

  La terre, morcelée de propriétés familiales, désignées sous l’idiome local, tiharqanin,
  est parsemée d’oliviers qui, ainsi que l’a écrit Malek Ouary sur cette région
  dont il est natif lui aussi dans son roman Le grain dans la meule à mesure
  qu’ils dominent le grand cours d’eau, prennent vigueur et embonpoint.

 

 
Après la farouche résistance de la Qalaâ nath Abbas du chef charismatique
  de la confrérie Errahmania, El Mokrani en 1871, les derniers bouts de plaine
  qui restaient aux autochtones montagnards tombent sous le séquestre en 1883.

  L’administration coloniale, sous le gouverneur général, le maréchal Gueydon ,
  s’implante à Akbou.

 

  Le fort Metz et la place Casanova Jean Noël y gardent encore quelques
  vestiges. Le premier village sur route d’Amalou porte toujours le nom d’un
  ancien colon, Biziou.

 

  Plus loin sur les hauteurs, le hameau Asrafil, aux consonances d’origine
  berbère a été rasé par l’armée française d’occupation et ne vit plus que dans
  la mémoire locale.

 

  Ces grandes tragédies du règne colonial et l’épopée de la résistance armée
  ont mis à vif et à rude épreuve la sensibilité des gens de la terre.

 

  Du berger au métayer, qui aux sons de la flûte, qui à la guitare, qui la voix
  nue, chantent. Ils chantent la misère et le désarroi de leur jeunesse
  désemparée, écartelé entre l’urgence de la survie et l’attachement viscéral
  au terroir.

 

  Allaoua Zerrouki est né le 5 juillet 1915 à onze heurs du matin au village
  Akourma (ancienne dénomination d’Amalou) dans la tribu des Aїt Aidel - ar ath Aїdel qeddam amecwar – Vers Aїt Aїdel poursuit ton chemin – ainsi
  chante-t-il les siens dans la chanson patriotique consacrée à la figure
  historique du colonel Amirouche.

 

  Son père, Seghir Ben Rezki, originaire d’El Flaye, dans la région des Aїt Ouaghlis, était l’imam du village Amalou.

 

  Il épouse Azzoug Ouardia qui lui donne deux fils dont Allaoua le benjamin.

  La famille possède de riches terres et de bêtes de labours. Le saint patron
  de la contrée, Sidi Hand U Yahia, grande zaouїa et école coranique, jouit d’un vaste domaine foncier
  en biens habous, des terres argileuses, riches d’oliviers.

 

  Lors des fêtes religieuses, de Chemini et des environs de Sidi Aїch, des groupes de paysans affluent, avec femmes et
  enfants, à la zaouїa de Sidi Hand U Yahia et y
  animent des veillées rituelles en longues litanies de dikr et de medh.
 

  Jeunes filles en mal de mariage, épousées désespérant la maternité, vielles
  pour d’autres desseins, exorcisent sur le catafalque du cheikh peines et
  lamentations.

 

  En contrebas, de l’autre coté de l’oued Soummam, à Akbou, l’école française
  ouvre ses portes au début du siècle après celle de missionnaires chrétiens
  d’Ighil Ali. Deux monde, deux écoles sans aucune communication.

 

  Le petit Allaoua fait l’école d’en haut, celle des coraniques.

  Son environnement immédiat, imprégné de mélodies de genre medh,
  aiguise sa sensibilité et ses dons artistiques qui ne tarde pas à s’affirmer.

 

  Travaillant les terres familiales, le jeune Allaoua affectionne
  particulièrement les lieudits champêtres Erriba et ahanou, à
  proximité d’Ighzer (le ravin).

 

  Il aime également aller méditer à Azru n Ledjnun (le rocher des diables).

 

  Sa maison natale est situé entre Tajmaât (le forum du village) et Azqin
  Ufella (la place d’en haut).

 

  Le village d’Amalou connaît au début du siècle des musiciennes joueuses du
  Bendir.

 

  Les villageois gardent encore le souvenir de deux femmes artistes,
  Tachaâlalt, Tajebarit, qui, décédées, ont emporté avec elles le secret de
  leur art et de leur pouvoir magique de donner la lumière et la guérison aux
  vibrations de leur instrument de musique.

  Mais cette tradition de l’oralité féminine survit encore avec d’autres
  héritières de la tradition, Hafsa et Na Cherifa.

 

  Du cotés des hommes, durant la période de l’entre deux guerres, la mémoire
  villageoise retient des noms d’artistes musiciens célèbres, premier maître de
  Allaoua Zerrouki dans son apprentissage des instruments a cordes au villages
  même, choses rare à l’époque où le instruments de musique sont bannis par la
  communauté.

 

  Larbi Abedelwahab Aboudali dit Kamedja pour avoir été un excellent violoniste
  et un virtuose de la snitra, meurt au village dans un dénuement total
  et Kadim boudjemaâ, dit Bouhou, virtuose musicien non voyant au mandole, est
  l’ami d’enfance de l’artiste. La famille kadim donne l’une des premières
  chanteuses kabyle à la radio d’Alger, Halima, dite Lla Ounassa qui se
  distingue au microphone de Mme Lafarge, rue Berthezène, à Alger, par sa voix
  de canari.

 

  Allaoua Zerrouki grandit dans ce berceau de rythmes, entre l’oralité première
  de la flûte du berger, du Bendir des meddahate et la nouveauté des
  instruments à cordes achetés des villes portuaires, Béjaia et Jijel où il
  exerce le métier du coiffeur.

 

  En 1927, Allaoua a douze ans. A cet âge. Sous la rigueur du climat, du
  relief, de la dure loi de la montagne et du colon, on est déjà homme pour
  siéger à la djemaâ, labourer les terres, construire une maison ou, à défaut,
  partir loin gagner son pain.

 

  Le jeune Allaoua est beau, charmant et doux. Il n’a pas la rudesse du paysan
  ahanant au manche de sa pioche. Il aime l’harmonie du monde et de la musique.
 

 

  Le village est trop étroit pour ses goûts et ses ambitions : il gagne Akbou
  et la ville de Béjaia où il exerce le métier de coiffeur-musicien.

 

  Dans ces deux villes et principalement Bejaia, il élargit ses horizons,
  multiplie les rencontres et noue des amitiés.

 

  Et c’est en adolescent instruit, fort de son art, qu’il fit la rencontre
  décisive de sa carrière de musicien chanteur avec le maître de chanson
  andalouse des Hammadites, cheikh Sadek Abdjaoui qui, subjugué par sa voix
  juste et timbrée et sa parfaite maîtrise de tous les instruments à corde et à
  vent, contribue grandement à l’enrichissement de sa culture artistique.

 

  Ivre de citadinité, de brillance et d’élégance, Allaoua Zerrouki apporte par
  ses fréquents retours au village, le luxe tapageur des villes côtières. C’est
  en zazou, affublé d’un costume Charleston, Prince de Galles qui ose s’exhiber
  parmi les siens à Amalou, du vivant même de son père qui d’espère de le voir
  abandonner ses propriétés familiales.

 

  Ce dandy en tenue d’apparat de la dernière mode et montrer du doigt et quel
  paysan oserait, sans s’attirer les foudres de la vindicte de la djemaâ, lui
  accorder la main de fille ?

 

  Il est, vers la fin des années 1930, un chanteur de charme célèbre dans la
  contrée de la vallée. Il anime des fêtes à Akbou, Béjaia, Jijel et conquiert
  Alger dans l’orchestre du célèbre pianiste Mustapha Skandrani.

 

  Sa première apparition sur scène, comme un défit à l’ordre ancien, il la fait
  dans un village de son douar, Ikherbouchène, à l’occasion de la fête de
  mariage de son ami musicien, Kadim boudjemaâ. Ses d’artiste sont inouїs : il a la voix d’un Agwufar et maîtrise
  tous les instruments à cordes.

 

  Charme et élégance font qu’il ne passe guère inaperçu lors de ses galas qui
  attirent tous les paysans de la contrée.

 

  Il a 27 ans quand son père décède en 1942.

 

  Son frère aîné prend le chemin de l’exil.

  La seconde guerre mondiale réquisitionne les récoltes ; la famine et le
  typhus ravagent le pays. La tribu Izerruqen, privée de son chef, vend terres
  et bêtes et met en baille quelques tiharqanin de valeur pour survivre.

 

  Le rêve et le luxe voluptueux d’Allaoua s’estompent. La faim tenaille les
  ventres et vide les esprits.

 

  Au village, il faut pourtant survivre. Mais le travaille de la terre n’attire
  pas l’amoureux de la brillantine et des costumes de la dernière mode. La
  misère ne lui sied pas. C’est alors le grand voyage en France.

 

  La même année, l’été 1942, des officiers français recruteurs de main d’œuvre
  indigène viennent enrôler sur la place du marché à Akbou de jeunes paysans
  postulant au dur travail des mines dans le Gard.

 

  Allaoua Zerrouki fait partie du contingent. Un de ses amis d’enfance que nous
  avons rencontré en 1995 au village natal de l’artiste, bouchena Lahlou, né en
  1917 s’est souvenu de cet épisode : L’été 1942, au marché d’Akbou, des
  ingénieurs français recrutaient des villageois pour le travail des mines en
  France.

  Allaoua et moi-même fûmes retenus.

  Nous fûmes désignés comme convoyer sur le bateau La ville d’Alger.

  Au port de Marseille nous restâmes huit jours ; après quoi nous fûmes
  affectés, chacun selon sa destination.

  La notre fut la mine des Rochebelle, dans le département du Gard.

  Le travail était pénible et les conditions de vie sont insupportables.

  Nous logions sur le site même, dans de sordides baraquements. Mon ami Allaoua
  n’a pas pu supporter le calvaire.

  Au bout d’une semaine, il partit à Paris où il fit plusieurs métiers de
  fortune : coiffure, serveur. Trois années plus tard, nous nous revîmes au
  village. La misère nous talonnait toujours. L

  e 8 mai 1946, nous reprîmes le chemin de l’exil de la même manière. Cette
  fois, nous fûmes recrutés à Péchiney, dans une usine de poison (comprendre de
  produits chimique). Allaoua, affecté à la centrale de charbon, abandonna au
  bout du troisième jour ; son beau visage était noirci de fumée. Il ne peut
  supporter tant d’insultes, lui, le brillant artiste, qui parlait si bien la
  langue de lghorba. Il pensait qu’on allait lui donner un bon poste. Il
  retourna derechef à Paris.

  Trois ou quatre années plus tard, j’appris qu’il était devenu un artiste
  célèbre et que se disques se vendaient bien.

 

 
Ce témoignage situe Allaoua Zerrouki au moment où il se lie d’amitié avec
  le grand artiste Mohammed El Kamal, l’un des maîtres qui a été à l’origine de
  l’émergence de nombreux artistes maghrébins en France au début des années
  1940, dont Slimane Azem et la célèbre chanteuse pionnière Fatma Zohra dont la
  biographie artistique mérite un livre. Il anime avec eux plusieurs tournées
  artistiques dans la région parisienne et sa périphérie.

 

  Allaoua aimait se produire dans l’un des premiers cafés Nord africains, appartenant
  à un compatriote de la vallée, Lahlou Messaoud, Cafés des Aїt Oumalou, au 43 rue Du Mesnil, dans le 12ème
  arrondissement.

 

  Il se produit avec Dahmane El Harrachi au 34 rue de Lyon au café de Lhadj
  Lakhdar U Hamou et au 5 rue Moreau chez Ouchène Mohand Ameziane, son café
  préféré pour les spectacles. Il aimait se également à la place Voltaire, à
  Belleville.

 

  Son orchestre brillait de tous feux avec un musicien dit Moustique, excellent
  batteur.

  Allaoua Zerrouki a introduit au pionnier, la batterie et la guitare
  électrique dans son orchestre ; ce qui était inhabituel dans le genre musical
  Kabyle de cette époque.

 

  Azzoug Madjid, le beau-frère de l’artiste, émigré retraité devenu écrivain
  public au village, raconte un pan important de la vie de l’artiste qui
  éclaire quelques éléments biographique contenus dans ses chanson : je l’ai
  connu bien avant qu’il n’épouse sa sœur, au village et à Paris.

  C’est en 1948 qu’il enregistre son premier disque
chez Pathé Marconi.
  Une chanson en arabe Lahbab l-youm, kif naâmel âala lwaqt elli ihhabbel et
  une autres en kabyles inspirées de sa douloureuse expérience dans les mines
  Tilifuf ssunni ssunni.

  Il habite alors au 10, rue St Sabin, Paris 11ème.

  En 1949 il est barman puis coiffeur à la gare de Lyon.

  Cette année-là, il avait rencontré une poissonnière des Halles qui devint sa
  concubine.

  En 1950, il rentra au pays et demanda la main de ma sœur, Nouara, qui avait
  fait des études et obtenu don certificat d’études primaires. Mon père refusa
  net.

  Il avait fallu l’intervention appuyée du ca
їd Ben Ali Cherif, homme
  puissant et influent dans la région, poète à ses heures, pour que le paternel
  consentît a la demande. Allaoua repartit en France avec son épouse et leur
  fils, Moh Seghir vers la fin de l’année 1953.

  A Paris, ma sœur apprit l’existence de la concubine et les choses n’étaient
  pas faciles pour elle, d’autant que cette concubine accompagnait Allaoua dans
  ses tournées artistiques.

  Ma sœur, excédée, décida de rentrer à Akbou avec son fils Mohand Seghir. Elle
  demanda le divorce qu’elle obtint à Akbou.

  En 1955, Allaoua la rejoignit eut lieu le 26 décembre 1955. le couple, une
  nouvelle fois réuni,eut son deuxième enfant, une fille. Mais la même trame se
  reproduisit. Allaoua tenait à son autre compagne. Nouara, de guerre lasse,
  après avoir confié ses deux enfants à la concubine qu’elle finit par
  connaître, rentra définitivement à Akbou et rejoignit les rangs de l’ALN à
  titre de résistante infirmière.

  Elle tomba au champ d’honneur les armes à la main…

 

 
Cette période tumultueuse,
  Allaoua Zerrouki la vit douloureusement.

  Toutes les chansons nées durant cette séparation sont consacrées à Nouara
  dont il demande le pardon et pour laquelle il exprime le regret et la
  fidélité à son amour.

 

  Toutes les chansons d’amour brisé, écartelé entre Yelli-s n tmurt (la fille
  du pays) et tarumit (la Française) ont été composées après le départ de
  Nouara et leur divorce.

 

  L’une des plus poignantes chansons autobiographiques dédiées à son ex-épouse
  Tabrats n taâzizt a été enregistrée au cours de cette période durant laquelle
  Allaoua Zerrouki ressenti l’exil au plus fort de sa solitude. Cette chanson
  n’existe pas dans le circuit commercial .

 

  A partir de la fin de l’annee1956, Allaoua Zerrouki mène une vie de militant
  pleinement engagé au sein de la fédération de France du FLN.

 

  En compagnie de Farid Ali, Mégari Slimane, Arab Uzellag et Amraoui Missoum,
  il anime plusieurs spectacles au profit de la cause nationale. Son café bar
  du boulevard Voltaire était devenu un point de rencontre de la cellule FLN du
  Quartier Latin.

 

  C’était un homme généreux, d abuxalfi (d’abuxlafi =sympathique et
  généreux), un artiste qui évoluait avec les célébrités qui se produisaient
  dans les grands cabarets orientaux de Paris comme El Djaza
їr, Les nuits du Liban, Le Tam
  Tam.

  Son orchestre était composé de musiciens confirmés. Ce sont là les propos
  d’un artiste du village d’Akourma, proche d’Amalou, qui a connu Allaoua à
  Paris au début des années 1960. bel homme, monsieur chic au chapeau mou, snob
  dans ses costumes d’apparat, amoureux de la brillantine et du brillant d’or
  qui revêtait la caisse de sa mandoline, Allaoua Zerrouki s’éteint des suites
  d’une longue maladie à l’hôpital St André des Arts, Paris 1er, le
  17novembre 1968, à l’âge de 53 ans. Il est enterré au cimetière Père La
  Chaise, principal cimetière de Paris.

 

 
Une autre version
  concernant les raisons de son décès fait état des séquelles d’un accident
  routier sur l’autoroute de Marseille. Allaoua Zerrouki et Dahmane El Harrachi
  se rendaient à Montpellier pour un gala. Allaoua ne se remet de cet accident
  qui a gravement affecté sa santé.

 

  D’autres témoins sont en revanche certains qu’il est décédé des suites d’un
  asthme sévère. Surnommé dans le monde musical maghrébin le rossignol kabyle,
  il a été encouragé pour sa voix de ténor par Lili
  Laâbassi, un des maîtres de
  Lili Boniche et du célèbre pianiste Maurice El Mediouni.

  Il a pour ami intime l’un des virtuoses au violon José de Souza, un des
  premiers musiciens de cheikh Mhamed
  El Anka au début des
  années 1940 à Alger et Blond blond.

 

  C’est sous la direction orchestrale de Amraoui
  Missoum qu’il enregistre
  une bonne partie de son répertoire dont le genre musical s’est très vite
  révélé original tant par les nouveautés introduites dans l’orchestration que
  par une voix restée inégalée à ce jour. Pimpantes, fluides et souvent
  entraînantes, les musiques de Allaoua Zerrouki portent en elles des airs de
  terroir moulés dans la musique savante andalouse héritée auprès du maître de
  ses premiers apprentissages, Sadek
  Abdjaoui.

 

  A la différence de plusieurs chanteurs de sa génération comme Slimane Azem, cheikh
  El Hasnaoui, Allaoua Zerrouki
  qui porte un nom et un prénom comme prédestinés à l’art, accorde une place
  privilégiée au texte musical. Sa voix est, elle-même, un instrument de
  musique, d’une exquise saveur à l’écoute.

 

  Harmonieuse, timbre et juste, elle fuse, limpide, comme une eau de source
  dans ses premiers jaillissements. On ne se lasse pas de l’écouter. Elle porte
  en elle à la fois beauté et légèreté mais aussi une infinie tristesse d’exil.
  Elle sait moduler amour, exil, patriotisme car son épouse Nouara est à la
  fois tout cela dans sa voix.

 

  Evoquer Allaoua Zerrouki, c’est aller aux racines d’un artiste qui a été l’un
  des plus authentiques et modernes de sa génération. Il a dit avec une
  sincérité rare ce qu’il a vécu dans sa vie la plus intime mais aussi ce
  qu’ont enduré ses compatriotes émigrés, forçats des temps modernes et leur
  engagement dans la guerre de libération nationale, cause pour laquelle son
  épouse est tombée les armes à la main qu’il a chantée, en ses heur, du font
  de ses tripes. L’originalité de cet artiste et d’avoir su si bien coupler
  beauté et tragédie dans ses chansons.

  Certes, il en a enregistré peu et c’est pour cela qu’il est resté dans la
  prospérité comme cheikh Arab Bu Yezgarène, son contemporain.

 

  Il fait partie de ces artistes qui demeurent rare par le fait qu’ils ont
  conquis la célébrité par leur bref passage dans le monde de la chanson.

 

  Allaoua a commencé sa carrière d’artiste ayant un produit enregistré en 1948
  en France et est mort prématurément à l’âge de 53 ans, la même année que le
  célèbre chef d’orchestre Amraoui Missoum, en 1968.

  A cette date, cheikh El Hasnaoui mis volontairement fin à sa carrière. L’empreinte
  des œuvres ciselée de Allaoua Zerrouki est aujourd’hui inestimable. C’est
  l’un des rares artistes, avec Slimane Azem, dont les œuvres n’ont pas été
  reprises jusqu’à la banalisation comme se fut le cas de plusieurs chansons de
  cheik El Hasnaoui.

 

  Il y a quelques années, la chanteuse Zahra N’Soumeur a repris quelques-unes
  unes des chansons mais le produit est passé inaperçu du grand public.

  Est-ce à dire que c’est un chanteur inimitable de son genre ? Certes pas.

  Est-ce à dire que le public qui le découvre aujourd’hui dans sa fraîcheur
  vocale et instrumentale exige l’authenticité de l’œuvre ? Certainement.

 

  Trois années avant sa disparition, il a donné un spectacle à Alger. Ce
  spectacle fut filmé par l’ex-RTA mais il est resté non diffusé à ce jour. Puis
  ce fut l’oubli.

 

  Les artistes qui l’ont intimement connu comme Dahmane
  El Harrachi ont disparu eux
  aussi. Les rares artistes qui nous ont livré leurs souvenirs de Allaoua
  Zerrouki comme Akli Yahiatène et Mohand Saїd U Bélaid ont eu ce mot à la bouche Meskin (le
  pauvre), se référant aux chansons d’amours qu’il a composées pour son épouse.
 

 

  Mais ils reconnaissent tous les talents artistiques. Allaoua Zerrouki a
  traversé trois périodes dans sa vie personnelle et artistiques.

 

  La première, à partir du début des années 1940 relatée par ses amis
  d’enfance, est noire. Il a connu même pour une courte durée, le dur travail
  des mines et des aciéries alors qu’il était déjà un artiste de charme avant
  d’être recruté pour ces travaux de forçat en France. Mais cette expérience a
  été à l’origine de ses premières créations artistiques grâce auxquelles il
  conquiert la scène artistique du milieu musical maghrébin à Paris auprès de
  Slimane Azem, Dahmane El Harrachi alors musicien et Amraoui Missoum.

 

  La deuxième période, à partir de 1953, avec un pic en 1956, devenu alors à
  son tour un des maîtres incontesté de la chanson maghrébine en émigration,
  lui fut pénible à cause d’une séparation à deux reprises avec son épouse
  Nouara. Mais, là aussi, il en tire les meilleures chansons de son répertoire
  dans lesquelles il jumelle deux thématiques, dans la même moule musical et
  textuel : amour et nationalisme.

  La chanson Lawjeb n wassen a,(la reponse de jour)  plus connu sur le titre Amirouche, et
  un exemple du genre. Alors que le texte est consacré à la mort de la figure
  historique du colonelle Amirouche, Allaoua lui compose une musique de
  valse, avec cœur de violon qui évoque les airs sur lesquels il a chanté son
  amour pour Nouara. Cette apparente asymétrie entre le texte musical et les
  paroles relève du génie de l’artiste qui évite les cloisonnements thématiques
  car il a vécu amour et patriotisme avec le même déchirement, la même passion.

 

  La troisième, celle des premières années de l’indépendance : chansons
  festives de l’indépendance du pays mais aussi louanges à celle qui a été
  durant plus d’un quart de siècle compositions, l’inspiratrice de son
  répertoire, dans la douleur de l’amour : Nouara.

 

  C’est l’un des rares artistes de la première génération de l’émigration, avec
  Slimane Azem, à avoir vécu en émigration avec son épouse kabyle.

 

  A partir de l’année 1953, en effet, les autorités françaises encouragèrent le
  regroupement familial.

  La quasi-totalité des artistes vécurent avec des françaises, comme cheik El
  Hasnaoui, Hacène Méziani et Akli Yahiatène. Le chanteur
  Salah Saâdaoui épousa la chanteuse El Ghalia qui était partie d’Algérie en tournée en France.

 

  Mais la particularité de Allaoua Zerrouki est d’avoir intégré dans répertoire
  son amour pour Nouara alors que tous les autres n’ont dit mot de leur épouse.
  Après plus d’un demi-siècle de vie commune, l’épouse de cheikh El Hasnaoui
  n’a jamais assisté à un spectacle donné par son époux.

                                                                                                 Essai de :"Rachid Mokhtari"

 

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26/11/2012
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Tamila de son vrai nom Chenna Nouara fille d'Akourma

"THAMILA" de son vrai nom  Nouara CHENNA   est née en 1939 à Akourma commune d'Amalou
dans la région de Bédjaïa. Elle perd ses parents alors qu'elle n'a pas encore
dix ans. Son père émigre en France avant la deuxième guerre mondiale. Sa mère
doit se battre avec sa belle-mère qui n’entend pas respecter sa position de
mère au sein de la structure familiale. C’est ainsi que naissent différents
heurts et malentendus et la mère de Nouara quitte le village du vivant même de
son époux pour gagner sa vie. Nouara est l’aînée et elle hérite, malgré elle,
du comportement révolté de sa mère. À peine sortie de l'adolescence, elle est
prise en charge par ses tantes paternelles qui agissent tantôt en protectrices,
tantôt en gardiennes de l'ordre masculin. Ce sont elles qui la donnent en
mariage et la poussent à divorcer le moment venu. Le jeu du mariage et du
divorce commence très tôt pour la jeune femme. Dès l'âge de douze ans,
dit-elle, elle entre dans le cycle infernal des mariages ratés, dont certains
sont dus au caractère effronté de la jeune femme et d'autres au fait qu'elle
n'est pas pleinement femme dans la mesure où elle n'a pas pu avoir d'enfants. À
cette «anomalie», s'ajoute le poids de l'exil forcé. Pour des raisons
matérielles, elle a suivi ses différents époux en France.L'exil est un
fardeauMa solitude aussiLa mauvaise compagnie dont je suis affubléeMe dégoûte
(Esseulée) C'est en France que Nouara apprend l'existence de modes d'expression
différents de ceux de la société traditionnelle et qu'elle opte pour les modes
de transcription modernes. Car elle découvre l'école à l'âge adulte et fait
d'elle-même le cheminement pour acquérir l'instrument nécessaire à sa survie :
l'écriture qui lui permettra de transcrire ses poèmes. Mais elle ne s'arrête
pas là ; elle effectuera une démarche particulière en s'adressant à une femme
anthropologue, proche d'elle par la culture, pour lui transmettre son savoir.
Comme pour de nombreuses femmes, ce sont les moments fondateurs de sa vie qui
vont ressortir dans ses vers. En premier lieu l'injustice première qui la prive
de l'amour de ses parents, en particulier de l'affection de sa mère disparue
très tôt :J'avais dix ansLorsque mère disparutMe laissant seule avec mon frère
(Ma mère m'a laissée)Dans son groupe d'origine, les hiérarchies sont clairement
définies : une fille abandonnée d’abord par son père puis par sa mère alors
qu’elle était encore enfant n'a pas la même position sociale (c'est le cas de
l'auteur) qu'une fille qui a un père. Ce thème revient comme un leit-motiv dans
ses vers :Père tu m'as reniéeComme si je n'étais pas ta filleMère, de moi tu
t'es déchargéeTu n'as laissé aucune traceJe ne connaissais pas encore la
vieLorsque vous m'avez abandonnéeVous m'avez laissée dans les larmesAlors que
j'étais dans l'innocenceVotre cœur n'a pas tressailliVous n'aviez pas craint le
SeigneurJe sais que ma complainte est justePuisque je suis de votre sangVous
m'avez laissé orpheline (poème 296)À ce handicap de départ s'en ajoute un autre
: elle n'a pas d'enfant. Nouara le vit comme une injustice, une soumission aux
aléas du destin. Elle fait parler les autres femmes qui, directement ou
indirectement, la qualifiaient d'arbre desséché, de bouc solitaire, lorsque
elle se rendait à la fontaine(tala) ou aux champs (lexla). Même si Nouara vit
en France, sa vision est restée celle d'une femme kabyle n'aspirant qu'à
répondre à son devoir de femme et d'épouse accomplie. Plus d'une dizaine de
poèmes sont consacrés à ce thème. En voici un extrait :Si j'avais un enfantCe
serait un jardin de bonheurJe lui ferais une maisonEt je n'aurais point de
souciIl égaierait mon cœurMais la chance m'a vouée à l'abandon. Elle s'en est
alléeEt a effacé la trace de ses pasSi je n'étais pas stérileJe ne divorcerais
pointEt ne me séparerais pas de l'aiméJ'aurais fondé un nid d'amourMais ce
n'est point de ma fauteCar traître est mon destin (poème 297) L'autre point
nodal de sa vie concerne sa relation avec les hommes qui ne peuvent être ici
que des maris le plus souvent imposés :J’eus un mariage de contrainteTel est
mon destinSept ans aprèsLa vie est pour nous deux Amère (Tel est mon
destin)Dans l'émigration, où le groupe se transforme tout en gardant les mêmes
moyens de contrôle que dans la société traditionnelle, Nouara aura à se situer
par rapport aux différents maris (elle s'est mariée cinq fois) : J'ai voulu
rencontrerL'âme sœurL'aimerEt vivre avec elleMais j'ai échouéEt tout s'est
écrouléEmportant mes espoirs, mes chimèresLa vie m'a joué un mauvais tour.
(Poème inédit)Elle doit aussi se situer dans un univers strictement féminin où
les positions des femmes sont définies par le statut des époux et par celui que
confère la maternité. Ces différents mariages l'ont amenée à affronter
belles-sœurs et belles-mères souvent cruelles.Il serait cependant faux de
croire Nouara enfermée dans ses problèmes. Elle s'intéresse à tout ce qui
touche son monde : la revendication culturelle et identitaire, l'immigration,
les événements politiques qui concernent son pays : Octobre 88 et les
événements récents. La trajectoire de cette femme est très significative ; elle
permet de saisir sur le vif la création par les agents de modes de production modernes
lorsqu'ils se trouvent hors de leur espace «naturel» d'activité Nouara est née
en 1939 à Amalou dans la région de Bédjaïa. Elle perd ses parents alors qu'elle
n'a pas encore dix ans. Son père émigre en France avant la deuxième guerre
mondiale. Sa mère doit se battre avec sa belle-mère qui n’entend pas respecter
sa position de mère au sein de la structure familiale. C’est ainsi que naissent
différents heurts et malentendus et la mère de Nouara quitte le village du
vivant même de son époux pour gagner sa vie. Nouara est l’aînée et elle hérite,
malgré elle, du comportement révolté de sa mère. À peine sortie de
l'adolescence, elle est prise en charge par ses tantes paternelles qui agissent
tantôt en protectrices, tantôt en gardiennes de l'ordre masculin. Ce sont elles
qui la donnent en mariage et la poussent à divorcer le moment venu. Le jeu du
mariage et du divorce commence très tôt pour la jeune femme. Dès l'âge de douze
ans, dit-elle, elle entre dans le cycle infernal des mariages ratés, dont
certains sont dus au caractère effronté de la jeune femme et d'autres au fait
qu'elle n'est pas pleinement femme dans la mesure où elle n'a pas pu avoir
d'enfants. À cette «anomalie», s'ajoute le poids de l'exil forcé. Pour des
raisons matérielles, elle a suivi ses différents époux en France.L'exil est un
fardeauMa solitude aussiLa mauvaise compagnie dont je suis affubléeMe dégoûte
(Esseulée) C'est en France que Nouara apprend l'existence de modes d'expression
différents de ceux de la société traditionnelle et qu'elle opte pour les modes
de transcription modernes. Car elle découvre l'école à l'âge adulte et fait
d'elle-même le cheminement pour acquérir l'instrument nécessaire à sa survie :
l'écriture qui lui permettra de transcrire ses poèmes. Mais elle ne s'arrête pas
là ; elle effectuera une démarche particulière en s'adressant à une femme
anthropologue, proche d'elle par la culture, pour lui transmettre son savoir.
Comme pour de nombreuses femmes, ce sont les moments fondateurs de sa vie qui
vont ressortir dans ses vers. En premier lieu l'injustice première qui la prive
de l'amour de ses parents, en particulier de l'affection de sa mère disparue
très tôt :J'avais dix ansLorsque mère disparutMe laissant seule avec mon frère
(Ma mère m'a laissée)Dans son groupe d'origine, les hiérarchies sont clairement
définies : une fille abandonnée d’abord par son père puis par sa mère alors
qu’elle était encore enfant n'a pas la même position sociale (c'est le cas de
l'auteur) qu'une fille qui a un père. Ce thème revient comme un leit-motiv dans
ses vers :Père tu m'as reniéeComme si je n'étais pas ta filleMère, de moi tu
t'es déchargéeTu n'as laissé aucune traceJe ne connaissais pas encore la
vieLorsque vous m'avez abandonnéeVous m'avez laissée dans les larmesAlors que
j'étais dans l'innocenceVotre cœur n'a pas tressailliVous n'aviez pas craint le
SeigneurJe sais que ma complainte est justePuisque je suis de votre sangVous
m'avez laissé orpheline (poème 296)À ce handicap de départ s'en ajoute un autre
: elle n'a pas d'enfant. Nouara le vit comme une injustice, une soumission aux
aléas du destin. Elle fait parler les autres femmes qui, directement ou
indirectement, la qualifiaient d'arbre desséché, de bouc solitaire, lorsque
elle se rendait à la fontaine(tala) ou aux champs (lexla). Même si Nouara vit
en France, sa vision est restée celle d'une femme kabyle n'aspirant qu'à
répondre à son devoir de femme et d'épouse accomplie. Plus d'une dizaine de
poèmes sont consacrés à ce thème. En voici un extrait :Si j'avais un enfantCe
serait un jardin de bonheurJe lui ferais une maisonEt je n'aurais point de
souciIl égaierait mon cœurMais la chance m'a vouée à l'abandon. Elle s'en est
alléeEt a effacé la trace de ses pasSi je n'étais pas stérileJe ne divorcerais
pointEt ne me séparerais pas de l'aiméJ'aurais fondé un nid d'amourMais ce
n'est point de ma fauteCar traître est mon destin (poème 297) L'autre point
nodal de sa vie concerne sa relation avec les hommes qui ne peuvent être ici
que des maris le plus souvent imposés :J’eus un mariage de contrainteTel est
mon destinSept ans aprèsLa vie est pour nous deux Amère (Tel est mon
destin)Dans l'émigration, où le groupe se transforme tout en gardant les mêmes
moyens de contrôle que dans la société traditionnelle, Nouara aura à se situer
par rapport aux différents maris (elle s'est mariée cinq fois) : J'ai voulu
rencontrerL'âme sœurL'aimerEt vivre avec elleMais j'ai échouéEt tout s'est
écrouléEmportant mes espoirs, mes chimèresLa vie m'a joué un mauvais tour.
(Poème inédit)Elle doit aussi se situer dans un univers strictement féminin où
les positions des femmes sont définies par le statut des époux et par celui que
confère la maternité. Ces différents mariages l'ont amenée à affronter
belles-sœurs et belles-mères souvent cruelles.Il serait cependant faux de croire
Nouara enfermée dans ses problèmes. Elle s'intéresse à tout ce qui touche son
monde : la revendication culturelle et identitaire, l'immigration, les
événements politiques qui concernent son pays : Octobre 88 et les événements
récents. La trajectoire de cette femme est très significative ; elle permet de
saisir sur le vif la création par les agents de modes de production modernes
lorsqu'ils se trouvent hors de leur espace «naturel» d'activité

Article :Nourddine


26/11/2012
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